Bien-être, stress, burn-out, lâcher prise, fatigue, anxiété…: des mots qui font quotidiennement la une des journaux, des mots (voire des maux pour certains) devenus usuels dans la communication.
En effet, nombreux sont celles et ceux qui font part de leur quête de bien-être. Ceci s’exprime souvent au travers d’une recherche d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ou d’une recherche de sens. Certes, ces cadres sont essentiels dans cette quête mais tout se joue-t-il directement là?
Chacun a sa propre définition du mot bien-être. Cette définition est en lien avec la recherche du respect de ses besoins personnels profonds, de ce qui est vraiment important pour soi et qui cherche à s’exprimer mais qui ne trouve pas nécessairement l’espace pour le faire, dépassé par les contraintes, les obligations, les faux besoins créés par les environnements, les injonctions parfois contradictoires vécues tout au long de la journée. Ne sommes-nous pas en partie responsables de cette situation ? Ne donnons-nous pas les autorisations à ces toutes choses qui nous enferment ? Peut-être acceptons-nous et sommes-nous entrés dans une logique de fonctionnement incohérente dans nos différents environnements, au regard de nos besoins, prisonniers de nos envies.
Besoins et envies bien-être
Les définitions du mot besoin sont nombreuses et parmi celles-ci, on retiendra :
Un besoin est « une exigence pour l’être humain ou l’animal née de la nature ou de la vie sociale » (le Robert). C’est aussi une « chose nécessaire à l’existence » (le Littré). Ou encore « ce qui est nécessaire pour assurer une existence satisfaisante à un être ou à un groupe » (dictionnaire de l’Académie Française).
D’une façon générale, les besoins sont soit innés, ceux que je qualifierais de besoins réels, soit acquis, ceux que j’identifierais comme des envies.
Les caractéristiques principales du besoin réel sont :
- que celui-ci est vital (dans le sens essentiel à la survie) et incontournable,
- qu’il est universel,
- qu’il est permanent même s’il est satisfait,
- qu’il est une forte source de motivation et d’énergie,
- qu’il ne peut pas être nié,
- qu’il est contraignant dans le sens où il exige d’être satisfait quel que soit le moyen employé pour y parvenir,
- qu’il provoque de la frustration ou un déséquilibre quand il n’est pas écouté et assouvi.
Le besoin réel est en lien avec le verbe Etre.
L’envie, quant à elle, est un besoin acquis, un « désir plus ou moins impérieux de faire ou d’avoir quelque chose. » (dictionnaire de l’Académie Française). Elle est personnelle, remplaçable et n’a rien de vital en tant que telle. Elle correspond aux nombreuses injonctions de l’Avoir, du Faire et du Paraître générées par les environnements dans lesquels nous évoluons. 🙂
Pour distinguer besoin et envie, il suffit de se poser la question : est-ce qu’une personne qui vit de l’autre côté de la terre, dans un endroit très reculé, éprouve le même sentiment que moi à l’égard de cette chose qui semble me manquer ?
Si la réponse est oui, il s’agit d’un besoin réel.
Dans le cas contraire, c’est une envie. L’envie pourra, selon les cas, être ou pas, un moyen de satisfaire un besoin plus profond mais jamais plus qu’un moyen. En tout état de cause, il y a plusieurs moyens de pouvoir satisfaire un besoin : certains seront “écologiques” (respectueux) pour la personne et d’autres pas.
Distinction faite entre le besoin et l’envie, on peut mettre autant d’énergie dans la recherche de la satisfaction de l’un ou de l’autre. Dans le premier cas, cela sera bénéfique car en cohérence avec ce que ressent émotionnellement la personne. La satisfaction de ce besoin sera source de bien-être. Dans le cas de la recherche de la satisfaction d’une simple envie, on peut tout à fait négliger ses vrais besoins et par là même aggraver le déséquilibre ressenti.
La pyramide des besoins selon Maslow
L’une des modélisations des besoins les plus connues est celle d’Abraham Maslow. Il a modélisé les besoins humains sous la forme d’une pyramide.
Selon la théorie des besoins de Maslow, la satisfaction du besoin à chaque niveau rend possible le travail à la satisfaction d’un besoin supérieur.
Les besoins physiologiques, de sécurité et d’appartenance sont des besoins primaires. Les besoins d’estime et d’accomplissement sont des besoins secondaires plus directement liés à la personne dans la réalisation d’elle-même.
A la différence du bébé et des animaux, qui eux sont uniquement dans le recherche de la satisfaction de leurs besoins innés primaires, l’homme adulte, quant à lui, est capable de mettre de côté et d’ignorer ses besoins réels profonds pour satisfaire des envies que ses environnements lui font miroiter comme indispensables.
Que ce soit pour satisfaire un besoin ou une envie, l’homme va s’adapter voire se suradapter aux exigences extérieures, éventuellement au détriment de son bien-être.
Adaptation et suradaptation
Qu’est-ce que s’adapter ?
Selon les dictionnaires, s’adapter c’est se conformer, s’accoutumer, se mettre en harmonie avec les circonstances, le milieu.
De tout temps, l’homme s’est s’adapté à ses environnements. Il s’est conformé à certaines de leurs exigences afin de pouvoir finalement satisfaire ses besoins profonds. L’adaptation est donc nécessaire et se fait en théorie selon un principe gagnant/gagnant.
Exemple : je m’adapte à mon environnement de travail car celui-ci me permet de gagner ma vie et satisfait donc mon besoin de sécurité. Dans ce cadre, l’environnement est gagnant puisque je mets mes compétences à sa disposition. De mon côté, je suis gagnant, puisque j’assure l’un de mes besoins essentiels.
Cette notion de gagnant/gagnant est primordiale. Aucune des parties ne doit être lésée dans la relation pour conserver son équilibre. Ainsi, avant de s’adapter, il est nécessaire d’avoir conscience de ses besoins profonds et d’être en mesure de différencier un besoin réel d’une simple envie.
Alors que les besoins humains sont clairement établis (cf pyramide de Maslow), leur satisfaction peut être atteinte de plusieurs façons. La plus écologique de celles-ci est celle qui consiste à rester dans le respect de soi et non de succomber aux envies que l’environnement nous fait miroiter comme la panacée, comme un besoin essentiel.
En effet, nos environnements quotidiens créent artificiellement une grande partie de nos envies. Ils nous laissent croire que nous sommes maîtres de celles-ci et usent parfois de stratagèmes qui parlent à nos émotions. Alors nous nous adaptons. Nous nous conformons, toujours un peu plus, à ce qui est attendu de nous dans l’intention de satisfaire ces envies sans tenir compte de nos besoins réels profonds voire même en bafouant certains. En tombant dans le piège de ces envies– bien souvent besoins créées de toutes pièces -, nous sommes alors pilotés de l’extérieur, nous perdons le contrôle. Nous ne faisons plus ce qui est bon pour nous mais ce qui est bon pour cet environnement qui nous sollicite toujours davantage. Nous entrons alors dans le piège de la suradaptation. C’est alors que notre bien-être est impacté.
Qu’est-ce que la suradaptation ?
C’est le fait de tenter de s’adapter de façon permanente et toujours un peu plus à toutes les demandes, à toutes les circonstances, à toutes les injonctions dans l’espoir d’atteindre un niveau de satisfaction optimale. Or celle-ci n’est jamais atteinte et un phénomène d’essoufflement apparaît. Les personnes touchées par ce syndrome ont le sentiment qu’elles ne savent pas s’adapter; que le problème vient d’elles. C’est totalement faux ! Au contraire, ces personnes sont atteintes du syndrome d’adaptation à tout prix. Au prétexte d’une quête d’un idéal créé de toutes pièces, les personnes en suradaptation n’agissent plus dans le respect de leur vraie nature et de leurs besoins véritables. Ceci provoque un déséquilibre dans leur être. Ce déséquilibre s’exprime au travers d’une perte d’énergie, d’une démotivation, d’une perte de sens, d’un stress récurrent, voire même d’une angoisse liée à l’inadéquation de la vie vécue au regard de leurs besoins profonds…
Finalement, le problème ne tient pas à la capacité de la personne à s’adapter mais tient à l’environnement dans lequel elle évolue. C’est l’environnement qui est « malade » mais c’est alors le bien-être de la personne qui est touché.
Comment sortir de la suradaptation ?
La solution à la sortie de ce comportement ne réside pas dans une approche d’apprentissage de la gestion du stress car il s’agirait là de proposer de continuer à se suradapter autrement! 😉
La bonne approche consiste à :
* tout d’abord être au clair avec ses besoins réels profonds et différencier l’essentiel du non essentiel. A certains moments de la vie, les besoins à satisfaire peuvent être d’une nature puis d’une autre selon les circonstances. Un besoin peut être satisfait à un moment donné puis ne plus l’être pour une raison ou une autre. Il redevient alors un besoin essentiel à combler,
* faire des choses qui comptent pour soi,
* reprendre son pouvoir de décision sur ce que l’on veut vraiment, ce qui fait sens, ce qui nous motive et nous donne l’énergie et d’agir en ce sens. En clair, être fidèle à soi-même,
* occuper pleinement sa place au cœur de son propre échiquier pour ne pas être un pion dans l’échiquier d’un autre en redéfinissant ses priorités,
* analyser ses environnements et y faire « le nettoyage » nécessaire le cas échéant, voire d’en changer si ceux-ci sont trop toxiques,
* sortir de la quête de perfection,…
En conclusion, un conseil de lecture bien-être
Je vous conseille vivement la lecture de « Le Principe du Petit Pingouin » de Denis Doucet aux éditions Marabout.
Ce livre commence par une courte fable : l’histoire de Little Boy, le petit pingouin heureux qui n’a qu’une envie, celle de toujours bien faire. Ceci n’est pas pour déplaire à Big Mouth, l’énorme phoque à capuchon, qui va le détourner de sa banquise en lui faisant miroiter un plus grand bonheur à condition qu’il suive ses directives. Little Boy, très volontaire, va donc s’adapter quotidiennement un peu plus aux demandes de Big Mouth. Mais les besoins de Big Mouth ne sont pas ceux de Little Boy qui l’apprend aux dépens de son bien-être…
A partir de cette fable, Denis Doucet explicite le phénomène de suradaptation et ses conséquences sur le bien-être. Au-delà de la compréhension et de la prise de conscience, il propose de nombreuses pistes pour en sortir. L’idée principale est de revenir à l’essentiel à savoir la satisfaction de nos besoins profonds sans tomber dans le piège du toujours et encore plus, toujours et encore mieux….
Evoquant les travers de nos environnements et de nos comportements dans ceux-ci, il nous invite à nous remettre au centre de notre échiquier et de nos propres décisions.